Mis à jour le 21.05.2019
Des recherches récentes révèlent l’effet bénéfique d’une spécificité génétique propre au système immunitaire de certaines femmes. Elle contribue à mieux protéger leurs jeunes enfants contre le paludisme et les autres maladies infectieuses très répandues dans les régions tropicales.
Si les hommes naissent tous égaux en droit, ce n’est assurément pas le cas s’agissant de leur immunité… Selon des travaux récemment publiés (1), certaines mères transmettent à leur enfant un potentiel de résistance aux infections survenant dans le début de la vie, bien plus efficace et durable que les autres. "Le transport d’anticorps à travers le placenta durant la grossesse contribue à la protection contre de nombreuses maladies pendant la petite enfance, explique l’immunologiste Florence Migot-Nabias de l’IRD. Selon les données issues de la littérature scientifique, les effets de cet apport persistent 4 à 6 mois après la naissance". Ces défenses sont particulièrement sollicitées chez les nourrissons vivant dans des régions tropicales, où les maladies infectieuses, comme le paludisme, sont nombreuses et omniprésentes.
Meilleure liaison anticorps-placenta
Protection accrue et prolongée
"Nous avons suivi, pendant plus d’un an après la naissance, un groupe constitué de près de 500 mères et leur jeune enfant, au Bénin", explique Célia Dechavanne. Pour les scientifiques, il s’agissait tout à la fois d’établir le statut des femmes par rapport à la fameuse liaison arginine ou histidine, et de suivre l’état sanitaire des nourrissons. "Les examens cliniques et biologiques ont montré que le transfert transplacentaire des anticorps maternels est significativement amélioré chez les enfants nés de mères porteuses de la mutation favorable. De plus, les facteurs d’immunité persistent beaucoup plus longtemps dans le sang des bébés", indique la chercheuse. Ce faisant, ces enfants présentent un risque de paludisme diminué de 32 %. Leur protection, quant à elle, perdure plus de 12 mois après la naissance, au lieu des 4 à 6 mois décrits habituellement. Enfin, cette mutation favorable au transfert des anticorps vers l’enfant à naître touche 24 % des femmes testées au Bénin, contre moins de 1 % dans les populations européennes. "Cette surreprésentation pourrait correspondre à la sélection d’un trait favorable dans les zones de forte exposition à des maladies infectieuses en général et au paludisme en particulier", note Florence Migot-Nabias.
Notes :
1. Dechavanne C., Dechavanne S., Sadissou I., Lokossou A. G., Alvarado F., Dambrun M., Moutairou K., Courtin D., Nuel G., Garcia A., Migot-Nabias F., King C. L., Associations between an IgG3 polymorphism in the binding domain for FcRn, transplacental transfer of malaria-specific IgG3, and protection againstPlasmodium falciparummalaria during infancy: A birth cohort study in Benin, PLoS Medicine, 2017, 14(10): e1002403.
2. En l’occurrence une des composantes des anticorps nommée IgG3.
Contacts : Florence Migot-Nabias, UMR MERIT / Célia Dechavanne, Center for Global Health and Diseases, Case Western Reserve University, Cleveland, Ohio