A l’instar d’autres enquêtes, le recueil d’information pour les autopsies verbales se fait grâce à un questionnaire.

© IRD - Marianne Donnat

L’autopsie verbale, instrument de santé publique

Mis à jour le 05.07.2019

Des mois après l’inhumation, une enquête auprès des proches permet d’établir la cause de la mort lorsqu’elle n’a pu être constatée par un professionnel.

La cause de la mort - élément qui accompagne l’établissement du certificat de décès par un médecin - est une information capitale pour la santé publique. Analysée à l’échelle d’une population ou d’un territoire, cette donnée permet de connaitre les pathologies sur lesquelles il convient d’agir pour réduire la mortalité. « Mais, dans de nombreuses régions du monde sans état civil et sans autorités sanitaires susceptibles de faire les constatations d’usage en cas de décès, sa collecte reste défaillante. C’est notamment le cas dans la plupart des zones rurales d’Afrique et d’Asie », explique le médecin-épidémiologiste Aldiouma Diallo.

Pour pallier ce déficit, les scientifiques ont eu l’idée d’aller périodiquement recueillir l’information épidémiologique sur le terrain. Il s’agit d’établir la cause du décès des personnes mortes dans l’année, des jours, des semaines, voire des mois après l’inhumation. Le principe ? Questionner l’entourage du défunt sur les circonstances de sa disparition. Cette autopsie verbale est normalement menée par un médecin. Pour élargir l’échelle d’investigation à une région entière, les chercheurs de l’IRD, pionniers dans le domaine de l’autopsie verbale, ont mis au point un questionnaire clinique bien codifié. Ainsi, les entretiens peuvent être confiés à des enquêteurs, sans mobiliser de médecin sur le terrain. Les données recueillies sont ensuite soumises à des médecins, travaillant en binôme. Au vu des symptômes décrits par la famille, du contexte épidémiologie de la région, de la logique du cas, ils font un diagnostic différentiel et, dans un grand nombre de cas, établissent la cause probable du décès.

Un enquêteur conduit une autopsie verbale dans une famille à Niakhar.

© IRD - Abdoulaye Karim Sow

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Cette approche pragmatique s’est révélée précieuse : des travaux de l’IRD, menés au Maroc il y a une trentaine d’années en s’appuyant sur l’autopsie verbale, ont ainsi montré la part insoupçonnée du tétanos dans les causes de décès des nouveau-nés. Une campagne de vaccination a suivi, qui a permis d’épargner de nombreuses vies. « Plus récemment, cette technique a mis en évidence l’importance méconnue des morts liées au cancer primitif du foie au Sénégal, indique le spécialiste. Une action préventive, basée sur la vaccination contre l’hépatite B, a été mise en place ».

L’utilisation d’outils numériques – ordinateur portable, tablette ou smartphone – et de questionnaires standardisés par l’OMS, pour saisir et transmettre les informations directement à des bases de données, permet d’améliorer l’efficacité de la technique. L’Inde a ainsi pu se lancer récemment dans une étude d’une ampleur inédite, visant à élucider la cause de plus de 100 000 décès…


Contact : Aldiouma Diallo