Rassemblement lors d’une distribution d'argent dans la préfecture de Kéran, au Togo.

© IRD - Justine Briaux

Des aides financières pour améliorer le quotidien des familles vulnérables au Togo

Mis à jour le 08.01.2021

Pour la première fois au Togo, un programme de transferts monétaires a été mis en place avec pour finalité de réduire le retard de croissance des enfants. Combinant distribution d’argent et sessions d’informations sur la santé et la nutrition, il a permis - via l’amélioration de la sécurité alimentaire et l’utilisation accrue des services de santé - de protéger les populations participantes de femmes enceintes et d’enfants en bas-âge.

Ils sont 144 millions d’enfants de moins de 5 ans à souffrir d’un retard de croissance dans le monde : 40 % d’entre eux vivent en Afrique. Pour combattre ce fléau, des opérations d'assistance monétaire ont notamment été mises en place depuis plusieurs décennies en Amérique latine et en Afrique de l’Est. Ces sommes d’argent distribuées à des populations vulnérables leur permettent en effet d’accéder plus facilement aux soins et d’améliorer leur alimentation.

Un coup de pouce

Des réunions d’informations sur la santé et l’hygiène ont permis d’améliorer la connaissance des femmes sur ces sujets.

© Yves Kameli

Bloc de texte

En 2014, le Togo expérimente pour la première fois ce type de programme dans 82 villages ruraux du nord du pays. Soutenu par la Banque mondiale et l’Unicef, le gouvernement distribue mensuellement pendant trente mois la somme de 5 000 francs CFA (7 euros) aux femmes enceintes et aux mères d’enfants de moins de deux ans : cette période des 1 000 premiers jours allant de la conception aux deux ans de l’enfant est en effet considérée comme la plus opportune pour agir sur la nutrition et la santé. Des sessions d’informations sur ces thèmes sont également organisées : afin d’encourager les bénéficiaires des transferts monétaires à s’y rendre, une gratification de 20 000 francs CFA est versé aux participantes les plus assidues.

Dans ces zones rurales, les revenus sont généralement instables.

© IRD - Justine Briaux

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Des chercheurs de l’IRD et de l’Inserm ont évalué les effets de ce programme à travers un essai contrôlé randomiséLes participants à l'étude sont aléatoirement répartis parmi les groupes correspondants à chaque approche testée. . Ils ont pu comparer la situation des mères et de leurs enfants entre 2014 et 2016, selon qu’elles aient reçu ou non cette aide financière. « Ces zones rurales sont très vulnérables et les populations dépendent de revenus agricoles instables, précise Justine Briaux, post-doctorante en épidémiologie à l’UMR Nutripass et première auteure de l’étude. Cette somme, c’est un coup de pouce que les femmes utilisent pour se rendre au centre de soins pour elles ou pour leur enfant s’il est malade. Elle leur permet également d’accéder à des aliments d’origine animale (viande, poisson, œufs…) plus coûteux et peu consommés habituellement. »

Effet protecteur

Résultats : ces aides financières ont opéré un effet protecteur sur ces populations. Les femmes se sont en effet davantage rendues en centre de santé pour accoucher et le nombre de bébé de petit poids à la naissance a diminué. Elles ont acquis plus de connaissances sur l’hygiène et la santé. Également, la croissance des enfants des villages ayant bénéficié des transferts monétaires ne s’est pas dégradée en comparaison avec celle des enfants des autres villages. De manière plus générale, les chercheurs ont constaté un effet positif sur les relations intrafamiliales : « Le niveau de violence subi par les femmes de la part de leur mari a été moindre, poursuit la post-doctorante. On peut mettre en avant que la somme reçue a diminué leur dépendance financière au sein du couple, évitant de possibles altercations dans les foyers où la violence aurait été de mise. »

© IRD - Justine Briaux

Le programme de transferts financiers a été étendu à d'autres zones rurales du Togo

Combiner à la fois les transferts d’argent et les sessions d’informations, tel est la clé du succès de ce programme. Son impact positif sur les femmes enceintes et les nourrissons a également montré l’importance d’agir durant la grossesse en matière de nutrition.

Continuer à évaluer

Depuis la fin de cette opération, le gouvernement togolais a étendu ces transferts monétaires à d’autres villages, en ciblant les ménages les plus pauvres. « Nous devons continuer à évaluer la mise en œuvre de ces programmes et les éléments contextuels qui peuvent entraver ou renforcer leurs impacts, estime Mathilde Savy, chercheuse en nutrition publique à l’UMR Nutripass. Nous pourrons ainsi identifier les leviers d'action les plus efficaces et orienter les bailleurs sur de futures opérations. »