Mis à jour le 28.07.2020
L’élevage du gourami est un élément important de l’économie indonésienne. Une alimentation associée aux plantes aquatiques et une meilleure connaissance de sa biologie pourraient aider à rendre cette pisciculture durable.
Le gourami géant, un poisson d’eau douce atteignant parfois 70 centimètres, est un animal essentiel pour l’économie indonésienne. Une centaine d’experts, d’étudiants et d’acteurs politiques vient de se réunirRéunion annuelle du réseau national de l’élevage du gourami. L’Institut Français d’Indonésie, l’IRD et ses partenaires du CFRD (Center for Fisheries Research and Development ) ont été promoteurs d’un workshop sur la recherche franco-indonésienne réalisée sur la biologie et l’élevage du gourami.1 à Purwokerto sur l’île de Java, pour évoquer les dernières avancées techniques et scientifiques de son élevage. Le gourami vit dans les étangs et est élevé traditionnellement en Indonésie depuis une centaine d’années. Au début des années 1990, le gouvernement décide de soutenir l’aquaculture, ce dont profite l’élevage du gourami : vingt ans après, le pays en produit 110 000 tonnes par an. Avec une croissance moyenne annuelle de 16 %, l’élevage de gouramis se développe dans un contexte de plus en plus difficile.

Les étangs d'aquaculture parsèment les paysages indonésiens
© IRD / J. Slembrouck
La durabilité de l’élevage menacée
« Le nombre de poissons par m² augmente et leur croissance est plus rapide du fait d’une alimentation industrielle, souligne le spécialiste de l’aquaculture Domenico Caruso. Mais cette intensification accroît les coûts de production tandis que l’efficacité de l’élevage reste faible avec des taux importants de mortalité. De plus, les gouramis subissent l’impact d’un environnement qui se dégrade car l’élevage est réalisé dans les zones périurbaines, à proximité de Jakarta. Face à la pression de l’urbanisation sur le foncier et la qualité de l’eau, cet élevage semble peu durable. »
L’enjeu est aussi de réussir à maintenir ce tissu aquacole en zone périurbaine, un milieu d’habitations et de petits étangs faisant vivre un nombre important de pisciculteurs. Pour ce faire, les rendements de ces élevages pourraient être améliorés grâce à l’introduction de plantes aquatiques flottantes. « Le gourami, herbivore, se nourrit de ces plantes qui purifient également l’eau, poursuit le chercheur. Leur introduction permet de réduire l’apport de nourriture industrielle, très onéreuse pour les éleveurs. Elles aideraient aussi à intensifier cet élevage de façon écologiqueLes méthodes d’intensification écologique des divers systèmes d’aquacultures sont l’objet d’études du projet européen IMTA-EFFECT qui contribue au financement des actions sur le gourami en Indonésie.» Ces plantes, déjà utilisées traditionnellement, ont fait l’objet d’études comparatives afin que seules les plus appropriées soient employées.
Mieux connaître sa biologie
Deuxième axe de réflexion : une meilleure connaissance de la biologie du gourami que peu d’études scientifiques ont exploré. « Les pisciculteurs rencontrent beaucoup de problèmes lors de la reproduction et la croissance des juvéniles, explique l’ingénieur en aquaculture Jacques Slembrouck. Les éleveurs sont également peu formés sur les pathologies et les causes de mortalité du gourami. Améliorer leurs savoirs sur ce sujet aidera à accroître les rendements sans avoir à intensifier l’élevage. »
De l’autre côté de l’Océan Indien, les pisciculteurs malgaches s’intéressent aussi au gourami. Introduit au 19ème siècle à Madagascar, le poisson y est devenu endémique, sans pour autant faire l’objet d’élevage. Des essais sont aujourd’hui réalisés pour l’élever en rizi-pisciculture extensive, associé à d’autres espèces comme la carpe ou le tilapia. Le gourami n’entre pas en compétition avec ces poissons et participe à la fertilisation des étangs à travers ses fèces et la distribution des feuilles. Riches d’une grande biodiversité végétale, ces points d’eau constituent un espace idéal pour l’élevage extensif du gourami. Dans le cadre d’un échange Sud-Sud, deux chercheurs indonésiens se sont rendus à MadagascarAccueillis par Jean Michel Mortillaro (CIRAD, Madagascar) et accompagnés par Jacques Slembrouck (IRD, Jakarta)1 afin d’y évaluer le potentiel de développement de l’aquaculture de ce poisson. Leur objectif est d’aider les pisciculteurs malgaches à intégrer cette espèce dans leurs étangs en prenant compte des spécificités locales et en respectant les objectifs de durabilité.